Nadine Denize

Rencontres du Cygne avec les adhérents,
le 2 juin 2017, dans les salons de l’Hôtel Bedford

 

Une merveilleuse soirée avec Nadine Denize, notre grande mezzo, dont une bonne partie de la carrière s’est déroulée à l’étranger – on sait qu’une des spécialités françaises, c’est d’ignorer le talent de ses ressortissant(e)s…

Annie Benoit présente notre invitée, puis Nadine Denize évoque quelques chapitres de sa vie. Enfin, c’est un échange animé avec la salle, qui bruisse de questions ! Mais, malgré tous nos efforts, nous n’arriverons pas à lui faire proférer quelques petites méchancetés sur ses collègues : la chipie qui se prend pour une diva, le chef caractériel… Nadine Denize est trop gentille !

Elle est entrée au Conservatoire de Paris dans la classe de Camille Maurane, puis a étudié avec Germaine Lubin. Celle-ci l’envoie auditionner à Bayreuth, où Wolfgang Wagner lui conseille de revenir dans 10 ans… En fait, Nadine Denize ne chantera jamais à Bayreuth. Pour chanter à Bayreuth, il faut être libre pendant trois mois, à peu près depuis le mois de mai, et son agent n’a jamais fait en sorte qu’elle soit suffisamment disponible…

Son premier Ring est à Genève, avec Hans Sotin ; sa chance, et sa première Kundry – elle n’a que trente ans -, elle la doit à Rolf Liebermann : Nadine Denize chantait une fille-fleur sous la direction de Horst Stein, tout en travaillant le rôle de Kundry. Un soir où la titulaire du rôle, Régine Crespin, est souf­frante, elle la remplace, et Liebermann la redeman­dera l’année suivante, où elle sera, cette fois, la titu­laire du rôle, face à John Vickers.

Le verre de l’amitié avec Nadine Denize

Kundry est, avec Eboli, le rôle qu’elle a le plus chanté. Mais elle a interprété aussi Marguerite, Cassandre dans les Troyens (les rôles de ses débuts), Venus, Brangäne, Ortrud, Clytemnestre dans Elektra, La femme sans ombre, Santuzza dans Cavaleria Rusticana… et bien d’autres rôles ! Le plus difficile – un travail long et ingrat – c’est d’apprendre les langues étrangères, le hongrois pour Le Château de Barbe-Bleue, ou le terrible tchèque pour les Janáček : Katja Kabanova, Jenůfa…

Parmi les chefs d’or­ches­tre qui l’ont marquée, il y a Georges Prêtre (pour Werther et Les Troyens), une personnalité rayon­nante, mais très exigeante, et aussi Karajan, qui était, dit-elle, et Clym le confirme, un homme charmant. Nadine Denize a aussi beau­coup travaillé avec Michel Plasson, ce grand défenseur de la musique française.

À quoi attribue-t-elle son exceptionnelle carrière ? À sa fidélité à Wagner… et au fait qu’il y a trente ou quarante ans, les chanteurs n’étaient pas piégés dans un système marketing où il est à peu près impossible de refuser un rôle sans risquer de se faire placardiser, même si on sait qu’on va se faire du mal…

La soirée se termine par un cocktail, aussi sympathique que délicieux.

Anne Hugot Le Goff